Prenant appui sur une recherche de deux ans menée dans un centre de santé mentale du nord-est d’Italie, cet article souhaite approcher la dépression par une pluralité de points de vue : celui du savoir scientifique qui a naturalisé la dépression et le corps des femmes par une approche biologique, celui de celles/ceux qui en souffrent, leur narration et leurs stratégies de recherche de soin. Il s’agit alors de saisir par-là leur subjectivation mise à l’épreuve par le désespoir, les symptômes du corps, la fracture biographique (Bury 2001) qui se produit au moment où la crise commence ; enfin, celui, quoique présenté de manière plus succincte, de l’entourage et du milieu communautaire, qui les labellise ou au contraire les soutient, favorisant des processus d’assignation différents. Prendre en compte la pluralité de ces approches nous amène à travailler la co-construction socio-historique de la dépression, en sortant d’une lecture s’adressant à la seule catégorie de « femmes sous influence » qui parait les définir.