Dans leur tentative de comprendre les cultures étrangères et de cerner les similitudes et les divergences partielles entre le monde du ‘soi’ et celui de ‘l’autre’, les ethnographes de l’antiquité avaient surtout recours, d’une perspective universaliste et transculturelle, à la confrontation. Dans la Germania de Tacite, deux modes de penser sont particulièrement pertinents ici. Le premier est le procédé que Tacite lui-même appelle ‘interpretatio Romana’ (ch. 43,3). Ceci consiste à postuler l’existence d’un certain nombre de divinités universelles, qui changent simplement de nom lors du passage d’une culture à l’autre. Aussi on trouve chez Tacite la tentative d’identifier les divinités des Germains avec celle des Romains. En revanche, le deuxième procédé consiste en l’opposition absolue des usages et des coutumes des peuples. A beaucoup d’endroits dans la Germania on observe très distinctement le schéma interprétatif du ‘mundus inversus’, celui du « monde à l’envers » selon lequel la culture étrangère finit par représenter l’inversion complète, le retournement absolu des coutumes romaines contemporaines.